Eldora - Tranche d’âge N°1
TRANCHE d’Âge A la résidence Les Charmettes à Bernex (GE), chats, chiens, lapins et poules font partie du quotidien des 84 résidents. Reportage dans un EMS pas comme les autres. «A lors, on fait comment maintenant ? » Paul * a suivi pas à pas tous les événe- ments de la matinée, du café partagé dans l’espace de vie La Chaumière en présence de l’auteur de ces lignes, au service du repas de midi à l’étage de la résidence.Cet ancien professeur d’Université est atteint de la maladie d’Alzheimer. A l’instar de la grande majorité des pen- sionnaires de l’établissement, il souffre de troubles cognitifs importants.De son ancienne vie, Paul a gardé une inclination à superviser. Mais les mots et les pensées ne suivent plus. Aux Charmettes, ce sont les petits bonheurs qui comptent, comme l’odeur du café percolé à l’ancienne et du pain grillé, ou la douceur d’un geste qui éveille de lointains souvenirs.Alors, on serre la main du professeur tout en le remerciant de son aide au moment de prendre congé. Un sourire illumine le visage de Paul. Le voilà rassuré, comme s’il avait accompli une mission avec panache et succès.Comme autrefois. En bordure de campagne, ni- chée au cœur d’un parc, la résidence Les Charmettes offre un cadre de vie idyllique.On y côtoie Opium, Chaussette, Chausson,Arlo,Vaïna, Rita, Jack qui évoluent librement dans les six lieux de vie de l’EMS. Des chats et des chiens, pour certains venus avec leur maître aumoment de l’arrivée dans l’institution, pour d’autres placés là par la famille d’un enfant atteint demucoviscidose. Un paysan genevois a même emmené ses poules au moment d’intégrer la résidence. MÉMOIRE AFFECTIVE «Les animaux amènent beaucoup d’apaisement aux personnes souffrant de troubles cognitifs. Ils permettent de rentrer en lien avec la mémoire affective des patients », relève Mikaëla Halvarsson, responsable de l’ac- compagnement auxCharmettes. Psychologue et cantatrice de formation, Mikaëla évoque la nécessité de changer de para- digme:«Les individus atteints de la maladie d’Alzheimer perdent leurs repères. Leur langage est souvent incohérent. Ils ne savent plus à quoi servent les objets et ont tendance à se défendre d’un environnement qui leur semble dangereux. Le contact avec les animaux leur permet inconsciemment de retrouver un rôle et rend plus sereine l’évolution de la pathologie.» Aux Charmettes, c’est bel et bien la sérénité qui prévaut avec une infinie bienveillance des collaborateurs. On y croise beaucoup de jeunes qui amènent fraîcheur et énergie. Ergothéra- peute demétier,Jeremy y effectue son service civil: «Ici, c’est l’insti- tution qui s’adapte aux résidents et non l’inverse.Chacun évolue à son rythme, selon ses besoins.» TOURTERELLES ET CHINCHILLAS Animateur en zoothérapie, Patrick Schopfer est présent deux heures par semaine aux Charmettes avec ses tourte- relles, ses cochons d’Inde, ses chiens, ses lapins, ou encore ses chinchillas. « L’animal n’est pas jugeant. Il permet de réunir les gens, d’apporter des moments de bonheur.Même si les résidents ne se rappellent pas forcément d’une fois à l’autre qui je suis ou ce que je fais là, je peux percevoir chez eux une expression de joie.» Parfois, il peut y avoir des accrocs lorsqu’un résident attrape un lapin par les oreilles ou se met à arracher les plumes de l’oiseau. C’est alors qu’il faut recadrer pour protéger l’animal et continuer à offrir des moments de bonheur aux uns et aux autres. * Prénom d’emprunt CES ANIMAUX QUI APAISENT TROUBLES COGNITIFS
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